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Allô PSA, dites-moi tout ce qui marche à bord


Les raisons d'espérer pour le groupe PSA par Renaud Roubaudi / Petites Observations Automobile

La crise que traverse PSA me fait mal au cœur. J’aime Peugeot et Citroën et j’ai du respect pour tous ceux qui travaillent dans le groupe. PSA est un joyau français et le savoir menacé m’inquiète profondément. Comme vous, je lis chaque jour des analyses sur la situation financière, la baisse du marché européen, et surtout sur les conséquences de la fermeture d’Aulnay, le désarroi et l’inquiétude des salariés. Chaque jour, j’étudie les interprétations d’éminents experts qui expliquent les erreurs stratégiques de PSA et ce qui aurait dû être fait. Aussi intelligentes soient-elles, toutes ces analyses me mettent mal à l’aise. J’ai le mauvais sentiment que l’on veut jeter le bébé avec l’eau du bain. Comme trop souvent, on se focalise sur ce qui ne va pas et l’on se sape collectivement le moral sous prétexte de briller intellectuellement.

Si j’ai choisi d’être indépendant il y a dix ans, c’est justement pour sortir de ce cercle pernicieux. J’ai adopté une philosophie que j’ai tirée de l’histoire de la mission spatiale Apollo 13. En 1970, en route vers la Lune, la fusée américaine subit un grave accident : l’un de ses réservoirs d’oxygène explose. Les trois astronautes sont condamnés, estiment les experts du centre de Houston, qui voient filer les réserves d’oxygène, de carburant et d’électricité. En plein chaos, le chef de mission arrive au centre opérationnel. Il va faire deux choses : primo, il ordonne à l’équipe terrestre de cesser les messages alarmants. Secundo, il appelle le commandant de la fusée pour lui demander une seule chose : « Dites-moi tout ce qui marche à bord ! »

Le commandant dresse la liste de ce qui fonctionne. Le chef de mission se tourne alors vers ses équipes et leur annonce : « Avec tout ça, nous allons les ramener sur Terre. » L’échec n’est pas une option. Quatre jours plus tard, après avoir bricolé des solutions à peine croyables, la Nasa ramène Apollo 13 sur la terre ferme et sauve cet équipage que tous les spécialistes avaient donné pour mort.

Observons maintenant, si vous le voulez bien, tout ce qui marche chez PSA et qui nous donne des raisons d’espérer.

Une gamme DS pleine de promesses

Le lancement de la gamme premium DS de Citroën est une réussite. Qui, il y a quatre ans à peine, croyait à cette issue ? Personne. Alors oui, on peut objecter qu’il s’agit d’une réussite franco-française, que la DS4 peine en Europe et que le chemin est encore long. Certes, mais la dynamique est là et le positionnement est juste. En avril, à Shanghai, sera dévoilé un concept qui préfigure la DSX (le SUV de la gamme) – sans compter qu’une DS9 et une DS6 sont dans les starting blocks. À n’en pas douter, trois superbes voitures, portant l’âme du luxe à la française. C’est le bon chemin. Et n’oublions pas qu’il aura fallu vingt ans à Audi pour devenir ce qu’elle est aujourd’hui.

E-Cube : un projet révolutionnaire de voiture essentielle

Le directeur de la stratégie produits et marchés de Peugeot et Citroën, l’excellent Vincent Besson, le souligne depuis longtemps : parce que les gens ont moins d’argent à consacrer à l’automobile, il faut penser une offre plus économique, mais tout aussi attractive. C’est le projet E-Cube de Citroën, qui dérive du concept C-Cactus, une voiture essentielle certes moins chère à produire, mais qui ne doit pas être confondue avec un modèle low cost.

Je crois énormément dans le projet E-Cube, qui, par certains aspects, pourrait incarner l’esprit de la 2CV originelle. Depuis quatre ans, Citroën a mobilisé tout son savoir-faire pour créer une voiture intelligente, sobre et belle. Je connais certains des designers qui travaillent sur le projet et j’ai confiance dans leur talent. Cette E-Cube devrait sortir l’année prochaine et incarner la nouvelle stratégie de Citroën : la marque se consacrera d’un côté au premium (avec la ligne DS) et de l’autre, à des voitures « simplifiées » mais étonnantes sur la gamme C (C3, C4, C5, Picasso).

Des Peugeot solides qui ne demandent qu’à monter en gamme

208, 3008, 508, 5008, RCZ et bientôt 2008 et nouvelle 308 : la gamme Peugeot est constituée de bonnes voitures, sérieuses, raffinées et agréables à conduire, car, pour ainsi dire, vivantes. Je loue souvent des 208 pour des déplacements, et j’apprécie la différence de conduite par rapport à des rivales sans saveur. La 208 possède un véritable esprit, une âme propre. Plus légère et plus compacte que la nouvelle Clio, elle a, je trouve, mieux compris son époque que sa concurrente de chez Renault, dont je crains qu’elle ne se démode vite.

Sous la houlette de Jean-Pierre Ploué (sans doute l’un des meilleurs patrons du design au monde), Gilles Vidal, le directeur du style de Peugeot (ex-Citroën) planche depuis trois ans sur les futurs modèles. J’ai rencontré Gilles plusieurs fois. Il a tout compris. Il faut juste lui accorder un peu de temps. La nouvelle Peugeot 308, dévoilée en septembre, sera la première de la marque à porter sa patte. Vous serez surpris : Peugeot va encore monter en gamme. Des projets alléchants sont dans les cartons, comme un coupé 4 portes, une micro-citadine, et j’en passe.

Une nouvelle plate-forme modulaire

Les futures Picasso et 308 intégreront la nouvelle plate-forme modulaire de PSA. Baptisée EMP2, elle va plus loin que la MQB de Volkswagen, pourtant citée comme « l’exemple absolu de la rationalité industrielle ». La base technique EMP2 va permettre de réaliser de substantielles économies d’échelle. Je ne résiste pas au plaisir de vous livrer une explication technique qui, bien qu’un peu longue, montre les avantages de cette nouveauté.

La plate-forme EMP2 de PSA pourra servir à toutes les compactes du groupe – sans oublier les dérivés cabriolets, monospaces, SUV, et même utilitaires. Au bas mot, 50 % de la production du groupe sont concernés, ce qui justifie les 630 millions d’euros investis pour rendre cette base technique totalement modulaire, plus légère et moins chère à fabriquer, sans sacrifier aucune prestation. Parce qu’elle utilise 76 % d’acier à très haute et ultra haute limite élastique, 2 % de matériaux composites (pour le plancher et le coffre) ainsi qu’un peu d’aluminium (pour les traverses avant et arrière, le pivot avant…), cette plate-forme s’allège déjà de 27 kg. Les techniques d’assemblage modernes (raboutage acier-alu, emboutissage à chaud, hydroformage et lamineur à épaisseur variable) économisent encore 10 kg. Des gains qui enclenchent un cercle vertueux permettant de dimensionner de nombreux organes à la baisse, ce qui retranche encore 33 kg. Rien que sur la plate-forme, 70 kg sont donc supprimés, complétés par 70 autres kilos épargnés sur la carrosserie de la future Picasso.

Cette EMP2, dont seul le bloc avant sera commun à tous les modèles, proposera 5 empattements (pour une amplitude de 22 cm), quatre largeurs de voies (soit jusqu’à 3,5 cm en plus ou en moins), et des postes de conduite bas ou haut. Elle logera deux trains arrière : un à traverse déformable et un multibras pour les modèles haut de gamme. L’aérodynamique n’a pas été oubliée, avec des entrées d’air pilotées, un carénage intégral sous le plancher et un capot abaissé grâce aux moteurs placés 5 cm plus bas. Cette plate-forme est compatible avec la technologie Hybrid Air (voir plus bas), ainsi qu’avec l’hybride diesel et les transmissions 4x4. Avec des pneus à très basse résistance au roulement (-4 g de CO2 au km), une direction à assistance électrique (-2 g), un Stop & Start (-4 g), un catalyseur de NOx sur les diesels (-3 g) – fini les émissions nocives pour la santé ! –, la baisse des émissions de CO2 serait de 22 %, soit 1 litre aux 100 km économisés. Le tout en améliorant les performances et l’efficacité du châssis grâce à la réduction de sa masse.

Un projet très prometteur d’hybride à air comprimé

En pleine tempête médiatique, l’information est passée quasi inaperçue, et pourtant, PSA vient de présenter un projet de moteur hybride hydropneumatique à air comprimé qui pourrait voir le jour en 2016. Sans batterie, deux fois moins cher à produire qu’un hybride classique, Hybrid Air promet des consommations et des émissions extrêmement faibles, en ville notamment. On parle de 3 l aux 100 km et de 69 g de CO2 sur une citadine de type C3 ou 208. Que ne lirait-on pas s’il s’agissait d’une invention allemande ? Mais en France, encore une fois, les médias s’interrogent, font la fine bouche et demandent à voir. Après la technologie de l’hybride diesel développée par PSA (que certains ont le culot de dénigrer sous prétexte que le diesel est maintenant montré du doigt), ce projet est prometteur, innovant ; il démontre que PSA approfondit ses réflexions en matière de R & D. Peu de gens le savent, mais en 2011, PSA a pris la tête du classement des déposants de brevets publiés en France, tous secteurs confondus, loin devant Renault (10e au classement). Ces brevets portent sur des éléments de design, mais aussi sur des procédés liés aux économies d’énergie ou encore sur de nouvelles générations de boîtes de vitesses. À ce sujet, une nouvelle boîte de vitesses automatique ultramoderne débarquera en 2016. Elle comblera un manque face aux boîtes DSG du groupe Volkswagen.

Une internationalisation en marche

La presse le répète à longueur de journée : si PSA souffre aujourd’hui, c’est parce qu’il est trop dépendant du marché européen, dont les ventes s’écroulent, et parce que le groupe a pris du retard sur les marchés émergents. Tout le monde le sait, et les dirigeants de PSA les premiers, bien entendu. Quand Philippe Varin est arrivé en 2010, il a d’ailleurs fait de l’international son cheval de bataille en créant de nouvelles filiales en Chine, en y envoyant ses meilleurs cadres, en ouvrant des points de vente spécifiques DS, en lançant une joint venture dissociée de celle de Citroën, en boostant les efforts sur le marché sud-américain, etc. L’internationalisation est en marche, mais PSA est au milieu du gué. Il ne sert à rien de le lui reprocher vertement. L’internationalisation s’effectue bel et bien, à marche forcée

Des économies drastiques

La crise a au moins un mérite : elle oblige (dans la douleur) à réaliser des économies impossibles à effectuer en temps normal. On vante le retour aux bénéfices de General Motors sur le marché américain, mais a-t-on seulement conscience que cela s’est fait au prix de 11 fermetures d’usines et de la disparition de deux marques du groupe ? Cette réduction des coûts fut humainement sanglante. En France, Dieu merci, on se bat pour trouver des solutions de reclassement et éviter au maximum les mises au chômage. C’est maintenant qu’il faut soutenir PSA de toutes ses forces, l’aider à trouver des solutions et arrêter de jouer au grand manitou qui répète « Je l’avais bien dit ».

Une alliance avec GM qui portera ses fruits pour les achats

Alors qu’on a toujours reproché à Peugeot de ne pas nouer d’alliances stratégiques d’envergure avec d’autres marques, on critique aujourd’hui son partenariat avec General Motors, laissant entendre que GM va manger le lion tout cru. C’est à croire qu’en France on perd à tous les coups ! Certes, il est compliqué de mixer deux cultures, de trouver le tempo entre les équipes ; oui, il est délicat de livrer des chiffres et des secrets d’entreprise – mais ces problèmes se posent pour toutes les alliances. Cela fait partie d’un processus normal de rapprochement. Cette alliance débouchera sur de substantielles économies grâce à des achats groupés. PSA s’engage donc sur le bon chemin industriel.

Des hommes et des femmes formidables

J’ai rencontré beaucoup de gens dans l’industrie automobile. Chez Peugeot et Citroën, j’ai toujours senti un état d’esprit particulier. C’est personnel, mais je trouve les équipes très humaines, attachées au bon sens, à une certaine mesure, porteuses d’un esprit familial. J’imagine leurs doutes actuellement. Je ne peux guère les aider directement, mais j’ai confiance dans l’avenir de PSA, dans ses choix et dans sa capacité à rebondir.

Finalement, ma seule inquiétude vient de la famille Peugeot

On me répète, sans en avoir la preuve, que la famille est profondément divisée sur les choix stratégiques à mener. Cela compliquerait la tâche de Philippe Varin, qui n’aurait pas les coudées franches pour agir. Or, de par mon expérience dans de nombreuses entreprises, j’ai toujours vu que dans la tempête, il fallait tenir son cap, bon ou mauvais. Dans de tels cas, il vaut mieux mal décider, plutôt qu’hésiter. Si j’avais un seul souhait à formuler, ce serait que la famille se retrouve et que chacun fasse les concessions nécessaires pour avancer dans la même direction.

Toutes ces considérations, je le sais, seront perçues comme une forme d’angélisme. Pourtant, j’en ai la conviction intime, la France se meurt en partie de son pessimisme et de son incapacité à consacrer son énergie à ce qui marche. Un état d’esprit entretenu par les médias, par certains spécialistes et membres d’élites qui n’évoluent jamais dans le concret. Or, pour avancer et reprendre confiance, il faut voir loin et ne pas se poser de questions à chaque pas.

So keep going !

Renaud Roubaudi/Petites Observations Automobile/Février 2013



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Mardi 19 février 2013

L’avis des Petits Observateurs

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