Souvenirs d'Autos • Citroën

Souvenirs d'Auto (220) : La DS abandonée

Une rubrique pilotée par le Commandant Chatel. Cette histoire, envoyée par Pierre (un très bon dealer de souvenirs), se déroule un début d’été à la fin des années 60, et elle ravivera j’en suis sûr la mémoire de nombreux Petits Observateurs.



Nous sommes aux premiers jours de juillet à la fin des années 60, les grandes vacances commencent à peine.

Nous avons neuf ou dix ans, nous serons bientôt des grands.

Il y a quelques semaines mon père achetait une Peugeot 204 berline bordeaux, l'auto neuve était belle et sa peinture brillante faisait comme une glace déformante et grossissante. Nous jouions souvent devant ce drôle de miroir en tôle.

Papa céda notre 4L Renault en bon état, à un collègue de travail, mais celui-ci la revendit aussitôt pour quelques centaines de francs de plus. Mon père, vexé, fut très en colère et je me souviens encore du soir où il rapporta la nouvelle. La maison grondait.

Ce jour, mon frère et moi attendions nos copains Franck et Christian. J'habitais en face de la mairie, là ou était notre école, Ami Six break jaune et Deux Chevaux bleue de nos instituteurs étaient d'ailleurs encore garées là.

Le soleil tapait fort et pour nous protéger nous portions tous un chapeau de cowboy. Sans trop de courage nous discutions tous les quatre devant la maison. Le village, indolent, était écrasé de chaleur.

Franck comme chaque année, partira en vacances à Juan les Pins (quelle chance il a!) dans la DS familiale par l'autoroute A6.

Cette Route du Soleil est maintenant achevée. Mon père nous emmenait je me souviens, voir le colossal chantier à Macon, nous marchions alors sur l'immense ruban de terre rectiligne, qui au loin touchait le ciel.

Des engins géants jaunes étaient alignés immobiles, le spectacle de cette puissante armada était fascinant.

Christian était arrivé récemment au village, son père était mécanicien dans le garage Renault à la sortie du bourg et chaque week-end, avec ses copains il bricolait un Buggy qu'ils avaient construit ensembles. Tous étaient passionnés d'Auto-cross, un drôle de sport.

Un samedi, ils stationnèrent sur la place avec Estafette, remorque et le petit engin monoplace, les villageois se pressèrent pour voir le curieux convoi.

Nous montions à tour de rôle dans ce drôle de bolide en nous glissant entre des tubes.



Ainsi ce bel après midi nous quittons le centre du village, traversons la route nationale 75 pour nous rendre sur le terrain vague devant la gare. Après des décennies d'abandon, taillis et futaies avaient recolonisé le lieu.

Dans cette vaste friche près des voies ferrées repose une Voiture bleue abandonnée dont on aperçoit le toit.



Attiré par l'endroit et curieux d'un nouveau jeu, nous voulons découvrir les secrets de la Belle oubliée là bas.

Je scrute les environs, nous sommes seuls, silencieux comme des chats, le cœur battant nous nous glissons parmi les hautes herbes qu'un léger vent chaud fait onduler. Une nature sauvage nous entoure.

De nos bâtons nous abaissons les ronces ou giflons les bouquets d'ortie en poussant des cris de barbares.

Nous sommes hauts comme trois pommes et approcher de l'Auto se mérite.

Hardis, nous gagnons du terrain et arrivons enfin tout prêt. Nous observons silencieux, et bâtons en l'air, à mon signal nous nous ruons à l'attaque de la Belle en hurlant comme des sioux. L'Auto n'a pas de roue, je bondis facilement sur le toit bleu, mes compagnons l'encerclent d'abord puis me rejoignent très vite. Nous sommes victorieux.

Fous de joie nous entamons alors une danse indienne sur le large toit de cette diligence.

Nous nous laissons tomber et glissons sur le pare brise puis sur le long capot. La tôle brûlée de soleil nous rôtit les fesses.

La silhouette originale et unique de cette Auto nous permet de reconnaitre aussitôt une DS Citroën.

Nous en voyons parfois traverser lentement le village. Gracieuses et silencieuses, elles ont l'allure d'une reine.

Nous allons et venons autour de la Belle qui repose sur des madriers, et avec son museau allongé elle semble tapie dans les hautes herbes. Les sièges, les portes et les roues ont disparu.

 

Nous ouvrons doucement le coffre puis le capot moteur, gare aux serpents. Prudents nous reculons d'un pas.

Nous entrons alors dans l'habitacle, quelle chaleur ! Je prends le volant, mes compagnons se serrent près de moi.

La Belle devient un avion, nous allons décoller et attaquer en piqué alors chacun s'invente un poste à bord.

Vaillant petit équipage.

Insatiables, nous montons la garde bâton sur l'épaule, la DS est maintenant notre fort et ce territoire gagné est notre camp, notre pré carré.

Nos jeux se poursuivent ainsi tout l'été, innocents et plein d'entrain.

Et chaque soir avant de m'endormir, je faisais défiler dans mes pensées le souvenir de ces magnifiques journées.

La DS Bleue oubliée là-bas au milieu des voies, fut notre repère idéal, notre terrain de liberté.

Cette rubrique est aussi la vôtre !

Racontez vos anecdotes au Commandant Chatel par mail (thibautchatel@icloud.com), il se chargera de les publier. N’oubliez pas que pour « Souvenirs d’Autos » nous cherchons de l’anecdote, de l’humain, de l’humour, de l’émotion. On oublie un peu l’arbre à came et le Weber double-corps… Et si possible, joignez à votre histoire des photos…. On adore ça chez POA ! Merci.

 

 

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Vendredi 29 mars 2019

L’avis des Petits Observateurs

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