Les Essais de Patrice • Renault

Une 12 Gordini pour la vie

Par Patrice Vergès. Lionel avait seulement 16 ans lorsqu'il a acheté sa première Renault 12 Gordini. Prés de 40 ans plus tard, il roule toujours au volant d'une 12 Gordini préparée par ses soins.
 

Voir aussi : Renault 8 Gordini 1300

La Renault 12 Gordini de Lionel ressort d'une restauration de carrosserie. Sous le soleil, le célèbre Bleu France 418 est éclatant !



Toutes les injections du monde, tous les meilleures synthétiseurs de son ne remplaceront jamais l'aspiration émouvante de deux carburateurs Weber DCOE de 45 qui alimentent le moteur de la voiture de Lionel. L'habitacle est transpercé par le râle rauque de l'admission plus celui très présent de l'échappement avec en prime quelques vibrations ici ou là. Ces sons vous transportent au sein d'une véritable voiture de course avec des sensations d'hier largement édulcorées dans nos véhicules d'aujourd'hui. D'ailleurs, la Renault 12 Gordini se muait en voiture de course tous les dimanches en participant à la célèbre Coupe Gordini.
 

En version Coupe, la Renault 12 Gordini était livrée sans pare-chocs. Les passages de roue AR ont été élargis sur ce modèle pour laisser passer des pneus plus généreux



Coupe Gordini

De 1971 à 1974, la Renault 12 Gordini succéda à la Renault 8 dans la Coupe. Si leur pilotage était totalement différent, le spectacle restait le même au sein spectaculaires combats. J'ai eu la chance de suivre la Coupe 1974 en accompagnant un participant sur les circuits et conduisant parfois sa Renault 12 Gordini et plus souvent sa DS tractrice. Cette année là, Lionel n'avait que 10 ans mais rêvait déjà devant la fameuse Coupe. " C'est à 16 ans, en 1980 alors que je n'avais pas le permis que j'ai acheté ma premier Renault 12 Gordini que j'ai trafiquée esthétiquement. Puis, j'en ai acheté une autre que j'ai préparée avec un kit moteur qui développait 140 ch. Mais c'est finalement en 1985 que j'ai découvert ce modèle datant de fin 1971 achetée un bouchée de pain car elle ne tournait que sur deux cylindres ".
 

La Gordini reprenait la planche de bord de la R12 normale avec un compte-tours et deux manos supplémentaires à gauche. Le petit volant très à la mode dans les années 70 n'est pas d'origine



Chargée de succéder à la mythique R8 Gordini, la version Renault 12 dévoilée en juillet 1970 rencontra pourtant un succès mitigé. Cette traction avant fut jugée moins amusante à piloter que la précédente Renault 8 et plus difficile à conduire avec sa direction très lourde. Pourtant avec sa puissance plus que doublée par rapport à la Renault 12 de base, c'était pourtant une véritable voiture de sport. Elle accueillait en position avant, le bloc de l'Alpine 1600 S dérivé du moteur de la Renault 16. Alimenté par deux carburateurs Weber de 45, il annonçait 113 chevaux DIN contre, par exemple, 88 pour la R8 Gordini. Cette puissance lui permettait de frôler les 185 km/h avec des accélérations intéressantes (31,9 s). Rapidement, Renault la proposa en deux finitions ; une luxe avec l'équipement de la Renault 12 TS et une type Coupe Gordini allégée sans pare-choc avec un intérieur simplifié notamment au niveau des sièges tubulaires.
 

Arceau de sécurité, sièges baquet siglés Gordini. Les garnitures de portes sont celles de la Renault 12 TS contre celles en carton pour les Gordini type Coupe



156 chevaux au banc d'essai

Quand Lionel a acheté la voiture de ses rêves, bien que très rare (5188 seulement produites) elle n'était pas encore collectionnée, victime de sa mauvaise réputation qui avait entaché sa carrière très courte notamment à cause de la crise énergétique de fin 1973 qui fit exploser le prix des carburants. Avec près de 20 litres aux 100 en avoinant fort, la Gordini n'était absolument pas en phase avec son temps. Devenue invendable, les dernières furent soldées par Renault jusqu'à fin 1974.
 

Lionel est un fin préparateur et son moteur le prouve : couvre-culbuteurs chromés, carburateurs DCOE Weber au diamètre impressionnant. La Gordini avait de l'appétit !



Ce n'est plus le cas aujourd'hui où sa côte en collection ne fait que grimper. Fin motoriste, Lionel a préparé sa belle bleue aux petits oignons au fil des années. " En fait, c'était à cause d'un carburateur bouché qu'elle tournait sur deux cylindres et je l'ai débouché en le trempant dans des bains d'acide et d'acétone. J'ai fait une préparation moteur AMS avec de pièces Condrillier : grosses soupapes, arbre à cames spécial, vilebrequin retaillé, bielles allégées, kit chemises pistons 1596 cm3, échappement quatre dans un. Au banc d'essai mon moteur donne 156 chevaux DIN avec beaucoup de couple à bas régime ! Nous allons aller l'essayer" invite notre hôte.
 

Gordini était encore un nom magique en 1972 que Renault abandonnera pour lui redonner vie à travers des séries limitées au début des années 2010



Sauvage !

La Gordini m'attend devant la porte. Elle vient de bénéficier d'une restauration carrosserie effectuée en grande partie par les sympathiques Fabien et Jérôme Labbé que les lecteurs de POA connaissent bien en tant que passionnés de Simca. Sa voiture a également subi une préparation de sa suspension très abaissée et fortement durcie avec carrossage négatif à l'avant, posée sur des pneus bien plus épais (195X13) que les 155 d'origine. Lionel me fait tâter de la suspension, c'est un bout de bois ! À l'intérieur, ambiance course garantie avec l'arceau de sécurité, les harnais et les magnifiques sièges baquet intégraux.
 

Le millésime 1972 adoptera cette prise d'air montée dans l'autre sens quand les carburateurs étaient coiffés du gros filtre à air. On l'inversait quand on l'équipait de trompettes d'aspiration



Moteur chaud, pression d'huile adéquate, Lionel qui aime ce qui va vite et fort me fait palper ses accélérations vivifiées par une boîte de vitesses aux rapports course. Une véritable fusée dont le train avant exige de gros muscles car la direction est très ferme (moteur en porte à faux) et il fallait tirer fort dans le volant pour la faire tourner car la Gordini (souvenirs) avait un peu trop tendance à aller tout droit.....
 

D'origine, la Gordini était chaussée de 155/13 remplacés par d'épais 195 à l'avant qui n'allègent pas la direction critiquée pour sa fermeté en 1970



Heureusement, les modifications de suspension effectuées par Lionel la collent au goudron et les roues avant ne patinent jamais malgré le manque d'électronique. L'opportunité de se rendre compte que la vision d'une Gordini parée de son fameux Bleu France 418 appelle les coups d'avertisseur et le regard admiratifs ou curieux des personnes croisées. Il est l'heure de se quitter. " J'en suis amoureux, m'avoue Lionel. C'est un souvenir de jeunesse et j'ai avec un plaisir en solitaire en préférant de petites routes désertes où je peux tirer 7500 tr/mn. Mais mon plus grand bonheur a été de faire toute la préparation moi-même. C'est la voiture d'une vie !"
 

L'année dernière sur POA, Lionel nous avait fait découvrir sa Renault 5 Turbo kitée. L'Homme aime les chevaux vapeur !


 

La Coupe Renault 12 Gordini a perduré de 1971 à 1974 avant de laisser sa place à la Renault 5. Les combats étaient toujours spectaculaires ! (photo Paul Lutz)


 

La Gordini lors de son lancement en 1970 avec ses roues d'origine, son bouchon spécifique de réservoir à gauche car sa forte consommation avait exigé un réservoir de 90 litres !


 

Amédée Gordini lors du fameux jour G en juillet 1970 qui a vu le lancement officiel de la Renault 12. L'année prochaine, on commémorera le 40e anniversaire de sa disparition.


 

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Lundi 12 novembre 2018

L’avis des Petits Observateurs

1 commentaire au sujet de « Une 12 Gordini pour la vie »

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Finalement, sans pare choc, elle fait très moderne! La quasi totalité des autos aujourd'hui ne sont plus protégées que par des radars bip bip.
Oui je sais, je suis un vieux ronchon.
Que celui qui n'a jamais fait un créneau serré et faisant de la place me jette la première pierre.
Merci pour cette capsule de nostalgie, la ligne, la couleur et sûrement le bruit d'admission et l'odeur d'essence mal brûlée sont une ode à mon enfance.

Samedi 1 janvier 2022 à 09h32

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