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Citroën : A la recherche d’une nouvelle gloire

Par Teddy Arzuffi. En pleine convalescence, un premier bilan de la crise que le groupe PSA a traversé s’impose : pendant la tempête, Peugeot et Citroën n’ont pas été logées à la même enseigne. Il semblerait en effet que Citroën ait eu à consentir à des efforts plus importants. Quelles raisons, quelles conséquences et quelles perspectives pour l’avenir des chevrons ? Tentative d’explications.

C1

Connaissez-vous le « story power » ? Sous cet emprunt à la langue de Shakespeare se cache un concept permettant de mesurer à quel point une marque automobile est capable de faire parler notre imaginaire. Plus le story power d’une marque est fort, plus cela veut dire qu’elle dispose, dans la mémoire collective, d’une image forte et puissante.

Sur nos trois grands constructeurs nationaux, bien que n’ayant aucune donnée officielle, Citroën doit être probablement en première place. Mythique « Deudeuche » de l’après-guerre, DS présidentielle ou encore Mehari de la série culte des Gendarmes à Saint-Tropez... Les Citroën collent à notre histoire contemporaine.

C2

Néanmoins, à quatre ans de son centième anniversaire, Citroën inquiète. Tout d’abord, parce que sa gamme actuelle est vieillissante. Dans un secteur où la durée de vie des véhicules ne cesse de raccourcir, C3, C3 Picasso et C5 ont toutes passé la barre de leur sixième année de commercialisation (plus de sept ans même pour la routière). Et pas de grande nouveauté prévue avant l’année prochaine. Certes, cela peut paraitre anodin mais leurs rivales respectives étant renouvelées, cela ne fait qu’accélérer leur processus de vieillissement. Conséquence directe, les ventes en pâtissent : dans un marché européen de nouveau en croissance, Citroën enregistre une hausse timide de ses ventes de 0,5% au premier semestre 2015. De plus, alors que le marché chinois ralenti (son premier marché en terme de volume), le français décroche de 6,7 points sur la même période.

C3

 Restylé en 2012, le C3 Picasso peine à masquer le poids des années.

Alors, comment expliquer cette situation ? Pour l’historien Marc Bloch, « il est nécessaire de connaître le passé pour comprendre le présent, mais la connaissance de l’actualité permet aussi de mieux comprendre le passé ».

Pour comprendre le présent de Citroën, revenons à la période 2004-2009. Citroën était LE constructeur à qui tout souriait. C4 originale, C4 Picasso moderne, C5 valorisante et résurrection plébiscitée de DS. Un tableau fort enthousiasmant, mais pas pour Peugeot. Le style de sa gamme dans la continuité de la 206 mais à la sportivité exacerbée paraissait peu novateur à comparer avec Citroën.

De plus, la très germanique C5 ainsi que la fraîcheur du luxe affiché par la ligne DS écorchait de facto l’image de Peugeot. Un comble pour le sochalien qui a toujours revendiqué, face à Renault et Citroën, une image plus bourgeoise. Ainsi, la famille Peugeot, encore propriétaire du groupe, a voulu redorer le blason du lion. Il s’en est suivi une redéfinition du positionnement des marques :

C4

Quasi inchangée depuis sa sortie en 2007, la C5 a suscité une grande euphorie tant elle valorisait l’image de Citroën.

A Citroën de s’inspirer de son C-Cactus Concept de 2007 pour inventer des automobiles simples et accessibles, mais pas low-cost. A Peugeot de redevenir le « boss » avec une gamme clairement premium généraliste. Quant à DS, à elle de chapeauter l’offre du groupe en incarnant l’image du luxe à la française. Un message a priori assez clair... seulement la crise est passée par là. Pour économiser de précieuses liquidités, Citroën a vu son calendrier de lancement retardé et a dû renoncer aux suspensions hydrauliques, technologie qui faisait sa réputation et son identité. Alors en pleine remise en question, l’arrivée de Carlos Tavares l’a contraint de surcroit à repenser totalement sa gamme. Dès son arrivée, le patron de PSA a pris deux mesures radicales auprès de Citroën : émancipation de la gamme DS et obligation de faire disparaitre huit modèles du catalogue d’ici 2022.

C5DS est devenue une marque indépendante de Citroën.

 Il en résulte qu’à l’heure actuelle, la gamme Citroën est d’une grande complexité. A tel point qu’il est difficile comprendre, en regardant le catalogue actuel, quelles sont les valeurs que la marque souhaite véhiculer. Avec un C4 Picasso au positionnement premium et à l’image technologique, un C4 Cactus qui renonce à la montée en gamme amorcée depuis des années et qui, bien qu’arborant un look de SUV, ne partage pas le patronyme jusque là dédié au seul SUV de la gamme, à savoir « Aircross », il y a de quoi y perdre son latin.

Faut-il en rester sur cette vision peu joyeuse mais réaliste ? Pas du tout ! Comme l’a écrit un certain publicitaire, disons « merde à la déprime » car plusieurs facteurs peuvent laisser présager d’un avenir meilleur.

Malgré la « valse des patrons » chez Citroën (quatre directeurs se sont succédés en 8 ans), les équipes de style sont restées stables. Un véritable atout tant ce domaine est stratégique. Jean-Pierre Ploué, auteur de la renaissance stylistique de la marque au début des années 2000 supervise depuis 2008 les styles du groupe. Bien que devant inventer une identité stylistique correspondant aux nouvelles valeurs de la marque, nul doute qu’il ait à coeur de réussir, tant le travail réalisé depuis 15 ans est colossal.

Pour cela, Alexandre Malval est un véritable atout. Déjà à l’ouvrage avec Ploué, ce directeur du style a du talent. Talent probablement bridé par les restrictions budgétaires de ces dernières années, comme en témoigne le restylage quasi invisible de la C4.

C6

A comparer cette C4 de 2015 et celle de 2010, c’est un petit peu le jeu des sept erreurs.

Néanmoins, le dernier Aircross Concept démontre que les designers Citroën sont sur la bonne voie. Cet SUV au style original et moderne démontre que le flou dans lequel se trouve Citroën n’est pas la cause d’un manque de talent de ses designers, mais bel et bien d’un plan produit trop souvent retardé.

C7

Avec ce concept, Citroën annonce vouloir avoir sa part du gâteau sur le très convoité marché des SUV.

De plus, même si son style ne fait pas l’unanimité, le dernier C4 Cactus a reçu, et cela n’a pas été assez souligné, le prix du World Car Design Of The Year 2015 au dernier salon de New-York.

Mais le C4 Cactus n’est pas qu’un design. Il est également une lettre d’intention quant aux valeurs qui seront véhiculées à l’avenir. Certes, il connait un succès relatif avec 80 000 exemplaires vendus l’an passé. Mais le choix stratégique de Citroën est courageux et encore inédit. En effet, depuis des décennies, tous les constructeurs ne jurent que par la montée en gamme de leurs produits et une surenchère à l’équipement. Citroën est le premier à vouloir tempérer cela en annonçant un message de simplicité, de voiture « essentielle », débarrassée du superflu.

 C8

Intérieur épuré mais ne renonçant pas aux équipements de sécurité et de confort : voici un avant-goût des futures ambiances intérieures des Citroën.

Il faut du temps pour que la clientèle s’habitue à ce nouveau message car dans nos sociétés de consommation, nous avons tous été habitués au message du « toujours plus » avec le sentiment de n’être valorisé que si l’on possède plus qu’auparavant. Certains restent dubitatifs quant au virage amorcé par Citroën. Il n’empêche qu’il y a là une carte à jouer. Dans nombre de secteurs, les consommateurs désirent revenir à l’essentiel en consommant des produits aux valeurs plus responsables. En soi, ce que Citroën souhaite proposer.

La stratégie actuelle est donc logique et cohérente et risque de s’avérer payante à moyen et long terme. Mais elle est probablement en avance sur le temps de la planète automobile. Mais ne serait-ce pas ce qui a le mieux caractérisé Citroën par le passé ?! Il y a donc tout intérêt à ce que le prochain salon de Francfort soit l’occasion de présenter une nouveauté de taille pour que la marque clarifie son positionnement et que la stratégie évoquée ces derniers temps puisse enfin prendre tout son sens.

Pour Citroën, l’heure n’est plus aux sacrifices mais à l’offensive, le tout dans un seul et unique but :  raviver la flamme autours des chevrons. Un défi gigantesque de plus, mais impossible n’est pas français !

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Dimanche 13 septembre 2015

L’avis des Petits Observateurs

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